Par Érick Deschênes
Une part de moi est emballée par tout ce qui se dit sur le prometteur attaquant russe, mais je crois aussi que l’on doit modérer nos attentes, particulièrement en ce qui a trait à ses performances d’ici la fin de la campagne 2024-2025.
Oui, plusieurs spécialistes du hockey, dont le réputé entraîneur Bob Hartley, croient qu’Ivan Demidov est le meilleur attaquant repêché par le Tricolore depuis Guy Lafleur. C’était il y a 54 ans pour ceux qui sont moins familiers avec l’histoire du CH.
Oui, Demidov a connu une saison recrue exceptionnelle dans la KHL, la ligue de hockey professionnelle senior russe, qui ont amené plusieurs experts à le nommer meilleur joueur de hockey à ne pas évoluer dans la LNH. Ce circuit est considéré comme la deuxième meilleure ligue de hockey au monde, après ce circuit.
À 19 ans et avec une utilisation particulière de ses services par son équipe en raison de son désir de se joindre aux Canadiens dès la fin de son contrat le 31 mai 2025, il a cumulé 49 points en 65 parties. Une performance supérieure à celles enregistrées à leurs débuts dans la KHL par Artemi Panarin et Kiril Kaprizov, désormais des locomotives offensives dans le circuit Bettman.
Ivan Demidov a tous les outils pour réussir et devenir un joueur marquant dans l’histoire des Canadiens de Montréal. Il est aussi un cadeau du ciel pour l’organisation montréalaise à ce stade-ci de la saison.
Aidé des dieux du hockey et par les efforts énergivores de sa troupe dédiée, le Bleu blanc rouge participera, à moins d’un accident spectaculaire, aux séries éliminatoires ce printemps. Mais on sent depuis un certain temps que l’équipe fonctionne sur «les vapeurs d’essence» et le talent du Russe aidera assurément le groupe de Martin St-Louis.
Il ne faut cependant pas oublier qu’Ivan Demidov a encore tout à prouver. Si la KHL est une bonne école, il demeure que ce circuit n’est pas le circuit Bettman, qui demeure la ligue qui réunit les meilleurs joueurs de hockey au monde. Reste à savoir combien de temps elle durera, mais le jeune attaquant devra assurément vivre une période d’adaptation au niveau de jeu de la LNH.
De plus, on parle d’un jeune homme qui ne quitte pas sa mère patrie pour la première fois pour deux semaines de vacances. Si contrairement à certains de ses concitoyens, Ivan Demidov avait hâte de «passer à l’Ouest» et s’est préparé à son arrivée à Montréal en compagnie de sa copine en perfectionnant son anglais et en prenant des leçons de français, il devra aussi s’adapter à un nouveau milieu de vie. Une étape qui aura aussi des impacts sur ses performances sportives.
Vraisemblablement, Demidov disputera son premier match sous ses nouvelles couleurs lundi, alors que les Canadiens accueilleront au Centre Bell les Blackhawks de Chicago. Arrivé à Toronto hier, l’ailier de 19 ans n’aura donc que trois jours pour faire disparaître les effets du décalage horaire et comprendre la structure stratégique de sa nouvelle équipe.
Côté tactique, à moins que Martin St-Louis nous sorte un lapin de son chapeau, Demidov obtiendra une place sur le deuxième trio du CH lorsqu’il sera inséré dans l’alignement. Le premier trio, composé de Suzuki, Caufield et Slafkovsky, est tout feu tout flamme. Quant à la troisième unité formée par Dvorak, Gallagher et Anderson, elle ne peut pas non plus être démantelée, ses succès en échec avant ayant permis au Tricolore de connaître ces séquences victorieuses depuis la Confrontation des 4 nations.
Je vous rappelle donc que cette deuxième unité est un trio qui connaît beaucoup de difficultés pour créer des chances de marquer à 5 contre 5. Si Demidov déloge Oliver Kapanen de ce groupe, il aura comme centre Alex Newhook et comme ailier Patrik Laine. Malgré que tout le talent du monde lui sorte des oreilles, le Russe effectuera ses présences sur la glace avec un centre très rapide, mais qui n’est pas reconnu pour sa vision du jeu et sa capacité à alimenter ses coéquipiers, et un ailier avec un tir foudroyant, mais qui est tout l’opposé de Newhook en termes de vitesse probablement en raison de sa blessure au genou subie pendant le calendrier préparatoire.
Est-ce que son talent sublimera ses futurs compagnons de trio ou les capacités de ces derniers limiteront Demidov (d’où l’importance pendant la saison morte que la Sainte-Flanelle obtienne un autre centre offensif de qualité)?
En résumé, n’oublions tout simplement pas qu’Ivan Demidov est une recrue et qu’il devra apprendre et progresser avant qu’il atteigne son plein potentiel. S’il s’adapte rapidement et qu’il livre des performances à la hauteur de celles d’un Lane Hutson, la saison 2024-2025 incroyable du CH pourrait encore nous réserver bien des surprises!
Cette chronique fait partie de notre section Opinions, qui favorise une pluralité d'idées. Elle reflète l'opinion de son auteur, pas celle du Journal de Lévis.