«C’est le moment d’avoir de l’avance plutôt que de voir le ministère venir vers les gens de Lotbinière en imposant une aire protégée. Si nous soumettons un projet avec les limites des citoyens, le ministère peut prendre notre travail et continuer. […] L’objectif, c’est de monter le dossier qui représente le mieux la réalité de Lotbinière», a soutenu le chargé de projet en biodiversité chez Nature Québec, Anthony Drouin.
L’organisation proposera au ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les Changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) d’analyser l’ensemble du territoire de la forêt.
«Ce qu’on suggère c’est de tabler sur une polyvalence de statuts à différents endroits dans la forêt. […] C’est la meilleure façon de mettre en valeur tous ses usages», a-t-il renchéri.
Il existe six types d’aires protégées qui ont été déterminés par l’Union internationale pour la conservation de la nature. Elles vont de la plus restrictive (un) à la moins restrictive (six). La réserve écologique Lionel-Cinq-Mars se retrouve dans l’une des classes les plus restrictives où l’activité humaine y est limitée.
Dans ce contexte, Nature Québec vise une aire protégée de catégorie cinq pour l’entièreté de la Forêt de la Seigneurie. Cette catégorie prend en compte de l’activité humaine qui se déroule déjà sur le territoire ainsi que des activités acéricoles et de foresterie.
«C’est une forêt qui est utilisée, qui est habitée et qui est proche des citoyens. Elle a une histoire patrimoniale. C’est évident que ça ne fait aucun sens d’en faire une réserve écologique ou de biodiversité sur tout le territoire», a spécifié M. Drouin.
Un peu plus de 16 % de la Forêt de la Seigneurie de Lotbinière bénéficie d’une certaine protection : la réserve écologique Lionel-Cinq-Mars et la réserve de biodiversité longeant la rivière du Chêne en sont des exemples.
Acériculteurs inquiets
Plusieurs acériculteurs assis dans la salle n’ont pas manqué de soulever leurs inquiétudes face à ce projet. Ils craignent qu’un statut d’aire protégée leur nuise.
«Le potentiel [acéricole] est grand, mais il y a déjà beaucoup de contraintes. Nous pensons que ça en ajouterait une nouvelle couche d’avoir un territoire protégé», a résumé le deuxième vice-président des producteurs acéricoles d’Appalaches-Beauce Lotbinière, Michel Gagné.
Au fil des années, les acériculteurs de la forêt ont vu la réglementation et les restrictions leur mettre «des bâtons dans les roues», a poursuivi M. Gagné. Tout comme ses confrères producteurs de sirop d’érable, il a fait valoir que les activités acéricoles aident à la préservation de l’endroit. Plusieurs sont des producteurs biologiques. «À notre avis, on fait partie de la solution. Nous devrions être considérés comme des partenaires.»
Ces inquiétudes seront prises en compte. «Nous les rencontrerons de nouveau. Ils veulent dire que l’acériculture est une bonne pratique pour la forêt. Nous allons l’intégrer et le nommer dans le projet que nous déposerons», a assuré la chargée de projet en biodiversité chez Nature Québec, Gabrielle Côté.
De son côté, Michel Gagné voit d’un bon œil cette ouverture de l’organisation face à leurs préoccupations.
Appel de projets
En mai dernier, le ministère de l’Environnement, de la Lutte aux changements climatiques, de la Faune et des Parcs a lancé un appel de projets d’aires protégées en terres publiques méridionales.
Le ministère veut protéger certaines parties des Basses-Terres du Saint-Laurent ainsi que ses milieux marins.
Rappelons que le gouvernement du Québec souhaite atteindre une cible de conservation de 30 % du territoire de la province.
Le projet doit être déposé au plus tard le 15 octobre. Les zones retenues seront présentées en 2027 et auront passé par plusieurs étapes de concertation et d’analyse.