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Éoliennes : assemblée de consultation mouvementée

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Photo: Mélanie Labrecque

09 janv. 2025 02:24

L’assemblée de consultation tenue par la MRC de Lotbinière sur l’adoption d’un règlement encadrant le développement éolien sur le territoire a été plutôt mouvementée. Les changements proposés ne sont pas passés comme une lettre à la poste auprès de la cinquantaine de citoyens présents au Complexe des Seigneuries dans la soirée du 8 janvier.

«Ce projet de règlement ne satisfait personne. On n’a pas pu en débattre de manière sereine. La façon dont on a été accueilli, on a eu l’impression d’être cordé, il n’y avait pas de place, pas d’enregistrement, pas d’écran dans la présentation. C’est bâclé comme travail, c’est un manque de respect envers la population», a résumé Jean-Pierre Ducruc, résident de Sainte-Croix. Ce dernier n’a pas été le seul à souligner les circonstances dans lesquelles s'est tenue la consultation. Plusieurs l’ont manifesté dans la salle.

Il a également déploré que le règlement, dans sa forme actuelle, était incomplet. «Il n’y a rien sur les cours d’eau. Ce soir, l’intervenant nous a dit que ce n’était pas la MRC qui s’en occupait, mais le ministère de l’Environnement», a-t-il renchéri.

La façon dont le tout a été présenté constitue un «manque de respect», envers les citoyens, a ajouté le président de l’UPA de Lotbinière-Nord, Denis Paquet

Le président du syndicat de l'UPA de Lotbinière-Nord, Denis Paquet. Photo: Mélanie Labrecque

Le projet de règlement a été déposé avant les Fêtes aux ministères concernés et la MRC a reçu une orientation préliminaire négative.

«Au retour des Fêtes nous attendions d’obtenir les éléments [à retravailler]. On en a eu jusqu’en fin d’après-midi aujourd’hui (8 janvier) et nous avons réajusté les dispositions du règlement selon ce que nous avons reçu», a affirmé le préfet de la MRC de Lotbinière, Daniel Turcotte. 

Le règlement

Les changements apportés par ce règlement au schéma d’aménagement visaient à harmoniser les différentes règles entre les municipalités et à «minimiser les impacts sur l’agriculture», a expliqué, en début de séance, le responsable de l’aménagement et de l’urbanisme à la MRC de Lotbinière, Mathieu Gagné.

Quant aux modifications, elles touchent, entre autres, l’écart entre les pales et les limites d’une propriété, la distance entre une éolienne et une habitation (de 500 à 700 mètres). Elle interdit l’implantation d’une éolienne à une distance inférieure à 300 mètres de l’emprise d’une autoroute, d’une route régionale ou d’une route collectrice, etc.

Pourtant, plusieurs citoyens ont eu l’impression d’être mis devant le fait accompli et que leurs commentaires ne seraient pas pris en compte. «Depuis un an et demi que ça dure, que le projet a été précipité dans la collectivité. Quand on pose des questions, il n’y a jamais de réponse. Ce qu’on savait c’est qu’à chaque fois, tout était décidé d’avance. On voyait que personne n’avait son mot à dire», a soutenu le citoyen de Saint-Édouard, Domaël Blanchet.

D’autres ont fait valoir qu’il n’y a rien pour la protection des animaux de ferme et des bâtiments agricoles. «Il n’y a aucune distance séparatrice avec les bâtiments de ferme, les pistes de VTT. Il y a certaines routes qui sont moins protégées que d’autres. […] Les producteurs travaillent au moins 10h par jour dans leurs bâtiments. Il y a des animaux qui sont sensibles aux ultrasons. Pour eux, il y a des risques non négligeables», a renchéri le président de l’UPA Lotbinière-Nord, Denis Paquet.

Une citoyenne a évoqué la taille des éoliennes. «On n’en a jamais eu des aussi grosses. […] Ça prend des recherches indépendantes.» Pour elle et plusieurs autres, une distance de 700 mètres des bâtiments n’est pas suffisante.

D’autres ont senti que la MRC voulait créer deux classes de citoyens par rapport à l’éloignement proposé : 2 km en zone urbaine, 700 mètres dans les rangs.

«C’est incompréhensible qu’une MRC adopte un règlement qui est discriminatoire. Il y a des maisons qui profitent d’une distance séparatrice quand d’autres n’en bénéficient pas. Pour être équitable, elle devrait être pareille pour tous les citoyens», a soutenu Stéphane Leclerc, un producteur de Saint-Édouard.

«C’est impossible, on ne peut pas avoir des distances de 2 km, il n’y aurait tout simplement pas d’éoliennes et ce serait contraire aux orientations gouvernementales. Le gouvernement nous donne des orientations pour favoriser l’implantation d’éoliennes, mais on ne peut pas dire qu’on n’en veut pas», a plaidé le préfet, Daniel Turcotte.

Stéphane Leclerc a refusé d’accueillir des éoliennes sur ses terres. «Chaque hectare de terre, c’est de la nourriture pour les gens», a-t-il rappelé. Le producteur laitier, Carl Marquis, de Sainte-Croix, abonde dans le même sens. «Il ne faut pas se le cacher, c’est très lucratif. J’avais la possibilité d’avoir deux éoliennes chez nous. On m’offrait 35 000 $ par année par éolienne pendant 30 ans. Il faut être un peu fou au niveau économique pour refuser, mais j’ai des convictions personnelles.»

Des impacts

Carl Marquis a profité de l’occasion pour soulever les conséquences que la polarisation du dossier ont eues dans la communauté agricole. Ce dernier a mentionné que les producteurs étaient beaucoup plus solidaires entre eux. «Nous sommes en train de perdre la chimie entre agriculteurs parce que certains en veulent et d’autres non.»

Le versement de redevance pourrait aussi détourner les agriculteurs de leur travail en les payant pour autre chose que l’agriculture.

De plus, la présence d’une éolienne sur une terre fera grimper sa valeur en flèche en raison des revenus qui y seront associés. Ce qui compliquera encore la vie aux agriculteurs de la relève qui se retrouveront devant des terres inabordables.

Report du dépôt

Le règlement devait être adopté lors du conseil des maires du 8 janvier. Elle a été remise pour tenir compte des commentaires présentés et des mémoires reçus.

Par ailleurs, afin de permettre à tous ceux qui n’ont pas pu poser de question ou émettre de commentaires pendant la rencontre, la MRC a prolongé la période pendant laquelle elle acceptait les commentaires et mémoires par courriel.

Rencontre difficile

«Nous avons eu de la difficulté à présenter et lire le règlement. Les gens sont arrivés ici avec une idée préconçue. C’est dur de convaincre des personnes contre ce projet de règlement», a déploré Daniel Turcotte.

La MRC s’est inspirée de ce qui s’est fait dans d’autres MRC ainsi que des recommandations des différents ministères dans la préparation du règlement, a soutenu le préfet.

Ce dernier rappelle que les villes et les MRC doivent trouver de nouvelles sources de revenus afin de ne pas alourdir le fardeau fiscal des citoyens. L’éolien est l’une de ces options pour les municipalités.

«Je comprends que c’est émotif, mais nous allons travailler pour voir s’il y a quelque chose de mieux à faire pour le règlement», a indiqué M. Turcotte assurant que des vérifications seraient faites sur les éléments soulevés par les citoyens «Nous allons voir ce que nous pouvons changer et ce que nous voulons changer.» 

 

 

 

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