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La solution à court terme? Éduquer nos enfants dans des «roulottes». Bien que cette solution nous soit toujours présentée comme étant temporaire, le Québec regorge de roulottes toujours en place 15 ans plus tard. Comme société, je ne crois pas que l’on doive se satisfaire de cette alternative, ce n’est pas un endroit propice à l’apprentissage pour nos enfants.
Les besoins sont réels, voire critiques à certains endroits. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : nos écoles débordent et vous le savez. À Saint-Apollinaire, nous avons déjà deux écoles primaires. La première est saturée depuis longtemps et présente des signes de désuétude que je qualifierais de notables. Disons gentiment qu’elle manque d’amour! La deuxième a été construite en 2019 et agrandie en 2021. En 2024, le CSSDN nous a demandé d’occuper une partie du terrain municipal adjacent à celui de l’école pour y installer ces fameuses roulottes temporaires. Une école neuve, agrandie trois fois en cinq ans, ce n’est pas ce que j’appelle avoir une vision.
Depuis 2016, Saint-Apollinaire défie les prévisions. Entre 2016 et 2020, nous avons connu une augmentation de population de 30,4 %, ce qui nous place au premier rang des municipalités d’au moins 5 000 habitants avec la plus forte croissance au Québec et quatrième au Canada.
Selon l’Institut de la statistique du Québec (ISQ), l’indice de vitalité économique de Saint‑Apollinaire est de 22,628, ce qui la place au premier quintile de l’indice. Le bulletin d’analyse de cet indice, publié en mars 2023 par l’ISQ, mentionne que les municipalités qui se situent dans le premier quintile «connaissent de manière générale une croissance démographique importante; elles affichent ensemble une croissance annuelle moyenne supérieure à 12,0 pour mille entre 2015 et 2020». Saint-Apollinaire affiche une croissance annuelle de 48,5 pour mille, soit quatre fois plus élevée que la moyenne pour la même période.
Dans ce même rapport, il est indiqué, selon des données de Statistique Canada (2022), que «la forte croissance démographique dans ces municipalités de banlieue (Saint-Apollinaire et Stoneham-et-Tewkesbury) est souvent alimentée par un afflux de jeunes adultes quittant le noyau des grandes régions urbaines pour vivre seuls ou, souvent, pour fonder une famille».
M. le ministre, à la lumière de toutes ces informations, expliquez-moi comment Saint‑Apollinaire a pu se retrouver dans la colonne non-prioritaire au moment de prendre vos décisions?
Ce refus me donne aussi l’occasion de vous sensibiliser face au désengagement des missions de l’État et du transfert du fardeau vers les municipalités.
En 2022, votre gouvernement a modifié la Loi sur l’instruction publique pour exiger aux municipalités de céder un terrain pour y aménager des écoles. Si nous ne possédons pas de terrain, nous devons l’acheter à grands frais et le donner au Centre de services scolaire. Vous avez alors ajouté une pression immense sur les finances municipales qui étaient déjà très fragiles.
L’éducation est-elle devenue une compétence municipale sans que personne n’ait avisé les conseils municipaux du Québec?
Contrairement à vous, les municipalités ne peuvent pas transférer ce fardeau à un autre palier gouvernemental. Pour nous, le fardeau est directement absorbé par le compte de taxes des citoyens.
Malheureusement, il s’agit ici que d’un exemple d’une longue liste. En voici un autre qui illustre bien ce désengagement de l’État.
Cette année, le ministère des Transports et de la Mobilité durable (MTMD) a procédé à des travaux de réfection sur la route 273, une route qui appartient au gouvernement et qui scinde la municipalité en deux. Au moment d’établir les plans de ce projet d’envergure, nous avons demandé l’aménagement d’un trottoir et d’une piste multifonctionnelle afin de rendre cette route sécuritaire pour les piétons et les cyclistes. À notre plus grand étonnement, le MTMD nous a refusé cet ajout. Vous pouvez me croire, pour ce ministère, les mots «mobilité durable» ne sont que dans le titre. La Municipalité a donc dû emprunter 1,2 M$ pour mener à bien ce projet. Cet emprunt, ce sont les citoyens de Saint-Apollinaire qui devront l’assumer.
J’en rajoute : en 2019, le MTMD a refusé de sécuriser la route 273 devant une nouvelle école primaire en construction. La Municipalité a dû débourser 800 000 $ directement de ses coffres pour installer un feu de circulation et aménager une piste cyclable sur une portion de cette même route pour sécuriser les enfants. Je rappelle que cette route est une propriété du MTMD.
Ce désengagement du gouvernement envers ses propres missions est inquiétant et transfère la pression sur les municipalités, en prenant bien soin de traiter les maires de «quêteux» au passage. Cette attitude paternaliste de votre gouvernement envers le monde municipal doit cesser.
Enfin, M. le ministre, pour revenir au refus de construction d’une troisième école à Saint-Apollinaire, je souhaite ardemment que cette décision soit revue, nos enfants vous le demandent!
Jonathan Moreau
Maire de Saint-Apollinaire