AGRICULTURE. Le contexte inflationniste des 12 derniers mois a fait mal aux producteurs agricoles québécois. Selon un sondage réalisé par l’Union des producteurs agricoles (UPA) du Québec auprès de 3 675 producteurs, une ferme sur 10 pourrait fermer ses portes au cours des 12 prochains mois.
L’augmentation du coût des intrants de production de 27,9 %, trois fois supérieur à l’inflation de janvier 2020 à septembre 2022 (11,8 %), et la hausse rapide et importante des taux d’intérêt depuis plus d’un an ont contribué à fragiliser la situation économique de plusieurs producteurs. Si bien qu’il faut maintenant 8 $ d’actifs pour chaque dollar de recette.
«Les résultats du sondage confirment que l’agriculture est plus impactée que d’autres secteurs par le contexte économique défavorable et que l’horizon s’assombrit pour un nombre grandissant de fermes, plus particulièrement les entreprises en démarrage. Il n’est pas trop tard, mais il y a urgence d’agir», a dénoncé le président général de l’UPA, Martin Caron.
Pour maintenir la tête hors de l’eau, plusieurs agriculteurs doivent investir d’importantes sommes d’argent, ce qui augmente d’autant leur dette et les rend plus vulnérables à chaque hausse des taux d’intérêt.
Pour plusieurs, la situation est tellement difficile que plus de six fermes sur 10 entendent diminuer ou reporter leurs investissements, plus d’une sur 10 réduira la taille de son entreprise et une ferme sur 10 prévoit fermer définitivement ses portes au cours des douze prochains mois.
L’enquête effectuée le mois dernier par l’UPA souligne que deux entreprises agricoles sur 10 rapportent une mauvaise ou une très mauvaise santé financière. Pour celles qui ont cinq ans ou moins d’existence, ce sont près de trois entreprises sur 10. Par ailleurs, cinq fermes sur 10 anticipent une détérioration de leur situation dans la prochaine année.
Parmi les autres constats, l’UPA note que trois entreprises sur 10 ne génèrent pas assez d’argent pour couvrir leurs obligations financières; trois fermes sur 10 se retrouveront avec un solde négatif en raison de la hausse des taux d’intérêt; quatre entreprises sur 10 considèrent que la hausse des taux d’intérêt pourrait les empêcher de s’acquitter de leurs obligations financières.
Des solutions
L’UPA propose également différentes solutions pour soutenir les entrepreneurs. Pour les entreprises en grandes difficultés financières, elle recommande de mettre en place une mesure de type compte d’urgence avec une portion non remboursable et reporter l’échéancier des entreprises agricoles en grande difficulté qui y ont eu accès ou d’instaurer un programme d’aide financière administré par La Financière agricole du Québec (FADQ) sur dépôt d’un plan de restructuration viable permettant, notamment, une recapitalisation du fonds de roulement, sans nécessiter la réalisation de nouveaux investissements.
S’ajouterait la bonification du programme de protection contre la hausse des taux d’intérêt de la FADQ (à toute la relève) : en abaissant les seuils d’intervention à 100 % de la portion d’intérêt excédant 3 %; en augmentant le montant de financement admissible à la protection à 1 M$; en augmentant la durée de la protection à 10 ans.
Il pourrait y avoir aussi la bonification du programme Agri-Québec pour les entreprises agricoles situées dans les régions périphériques; l’actualisation de la rémunération de l’exploitant au Programme d’assurance stabilisation des revenus agricoles; et la mise en place de mesures pour de s’assurer que le prix du diesel coloré payé par les entreprises agricoles soit inférieur au prix du diesel clair afin de refléter l’écart de taxes entre ces deux catégories de diesel.
Intervention nécessaire
L’UPA a porté plusieurs fois ces conditions difficiles à l’attention des gouvernements du Québec et du Canada et indique que plusieurs solutions sont à leur porter. Toutefois, il faut aller au-delà des programmes habituels qui n’ont pas été pensés pour des situations comme celle qui touche le pays en ce moment.
Par ailleurs, la réglementation agroenvironnementale vient aussi compliquer la vie aux producteurs agricoles en ajoutant de la pression sur leurs entreprises. L’UPA pointe le Règlement sur les exploitations agricoles et le Code de gestions des pesticides. Ces changements arrivent à un bien mauvais moment, explique l’UPA.